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- Moulin à paroles -

  • Photo du rédacteur: Alizé
    Alizé
  • 19 nov. 2024
  • 3 min de lecture


Voyez-vous Docteur, ça ne va pas… Je sens que ça ne va pas !

Mais je ne sais pas trop pourquoi. Tout va bien, mais rien ne va.

Tout ça, là… Ce n’est pas moi. Ou peut-être n’est-ce pas ce que je voudrais que ce soit.

Je ne veux pas tout. Non, ça ne je ne veux plus. Car je sais que c’est superflu. Je veux un peu, mais mieux.

Attention, je suis reconnaissant. Ce pourrait être pire, mais rien que le fait de le dire… Cela ne signifie-t-il pas... que cela ne me suffit pas ?

 

Finalement, c’est assez compliqué. Vous avez du temps, on peut en parler ? Avant de vous écouter, je voudrais juste vous raconter. Pas longtemps… Juste un peu de contexte pour que vous me compreniez vraiment. Ma vie n’est pas simple, je crois. Non, je dirais plutôt que dans ma tête, tout est de guingois. Parfois j’essaye de ranger, mais c’est comme à la maison… Ca tient un temps et puis bon… Il faut recommencer.

 

Quand je tente de dénouer les nœuds, je me pose milles questions. Je tente d’y répondre au mieux et comme je n’y arrive pas, je me sens con. On est censé savoir je pense… Un peu comme quand on danse. On place un pied devant l’autre, on voltige, on tangue, on bouge en rythme. J’ai l’impression que je ne sais pas danser. Après tout, chacun son métier.

 

C’est pour ça que je viens vous voir Docteur. J’ai besoin de votre aide. Grâce à vous, je vais dénouer les fils de mon cœur. Ensuite, je pourrai peut-être gouter au bonheur.

Vous me direz, quand je vous laisserez intervenir, si finalement c’est bien ça le but ? L’objectif, c’est d’être heureux ou de se prendre des uppercuts ? Pour ce qui est de la seconde proposition, je pense que je suis champion. Si j’ai le choix entre deux situations, je vais inévitablement opter pour celle qui me remue tel un vieux torchon.

 

N’allez pas penser que je suis poltron ! Ah non. J’ai bien compris.. j’assume. C’est la vie. Et puis j’apprends. C’est pas ça qu’on dit tout le temps ? Grandir dans l’erreur, ouvrir les portes des possibles… tout tenter. Franchement Docteur, plus j’y pense.. plus je trouve ça risible.

 

Je n’irai jamais à Hollywood, et je ne serai pas millionnaire. Mais parfois, je peux réconforter mon enfant qui boude et je fais un gâteau au chocolat d’enfer ! Quand je regarde les gens, je me dis que le problème c’est moi. En fait, Docteur, je suis fatigué. J’aimerais parfois ne plus être là. Pas de panique, je ne prendrai aucune mesure drastique. Cela dit, à force de se montrer plus beau qu’on est vraiment… Est-ce qu'on se rend compte à quel point tout le monde se ment ? J’aime à croire que je prône certaines valeurs, Docteur. L’honnêteté notamment. Et bien sachez-le, je me trouve nul. Je n’aime pas ce que je suis au naturel. Une coquille vide à tout le moins. Inutile à l’échelle du monde, vaguement supportable dans ce quotidien immonde. J’en viens à penser… A quoi sert tout ce cirque ? Mais enfin, restons ancré… Rien ne sert de divaguer. Il y a déjà bien assez à discuter pour se lancer dans des discours métaphoriques.

 

Je suis déprimé, conclurez-vous. Burn out, bored out, stress post-traumatique ou je ne sais quel autre nom scientifique. Avant que ne sautiez sur votre conclusion, Docteur, je souhaiterais d’abord dissiper une tension. Je ne suis pas fort à l’aise de vous raconter ma vie. Car finalement, qui me dit que la vôtre, vous l’avez réussie. Les cordonniers sont de réputation, mal chaussés. Et vous ? Vos émotions… Sont-elles bien gérées ? Parviendrez-vous à m’écouter, m’aiguiller sans m’altérer ? J’ai peur, Docteur. Et si vos paroles venaient à ouvrir d’autres possibles. Je me sentirai tenu, obligé d’aller les explorer. Je veux être certain. Je veux des résultats. Je veux que ce soit rapide. Je veux aller mieux. Je n’ai pas de temps à perdre. Il faut que ce soit efficace. Vous m’entendez Docteur ? Je veux guérir, car quelque chose ne va pas chez moi. Je suis fou !


Docteur !

Docteur !

Réagissez!


Vous ne dites rien depuis tout à l’heure ! Je vous dis que je suis fou et vous ne dites pas un mot.

 

L’homme pose sa tasse de café sur le bord de la table, se frotte les paupières douloureuses. La nuit a été longue, les insomnies sont récurrentes. Il prend son téléphone et compose un numéro.

 

« Cabinet du Dr Rhabi, j’écoute ? »

« Bonjour Madame, c’est Monsieur Jacques, j’aimerais prendre rdv, c’est urgent ».

 

Alizé Beaufays

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