- Effroi et Chocolat -
- Yothann
- 22 oct. 2024
- 4 min de lecture
« Votre chocolat Monsieur » .
Derrière cette simple phrase, une hôtesse de l’air. Un regard souriant sur un visage magnifique d’une trentaine d’année qui par amas de maquillage pour en paraître 20 lui donne l’air d’en avoir 40. D’un simple merci je la congédie en la délaissant du breuvage cacao. Chaud et complètement artificiel, ce chocolat ne peut me substanter.
Mais peu importe, dans quelques heures je serai arrivé en Irlande….
Terres de magie, vais-je enfin rencontrer le Dullahan ? un personnage sans prise de tête. Me laisserai-je compter un message de l’au-delà apporté par un papillon ? Je me laisse ouvert à toute magie et comme le papillon, je cris (za) l’id-ée de faire des rencontres paranormales.
Je me rends au fin fond des terres de l’Ulster. Dans la description du voyage, les 3 derniers kilomètres se font à cheval pour atteindre une auberge pittoresque perdue au milieu des bois. J’espère ne pas endurer la malédiction de Macha mais j’espère vivre des aventures folkloriques et magiques.
L’aventure commence tout de suite avec un voyage en taxi de l’aéroport vers le dernier village avant la forêt de « nach bhfuil ann ». Un long trajet assourdissant du silence d’un chauffeur indien qui ne maitrise aucune langue compréhensible. Un paysage monotone, pâtures avec Hangus, suivies de pâtures avec moutons, suivies de pâtures vides et on recommence inlassablement. Je voulais plonger au pays des songes et seules mes fesses se sont endormies et me le rappellent à notre arrivée au village.
Découverte enfin du plus profond de l’Irlande et…. Je déchante. Tout, à part l’odeur du Hangus omniprésente m’évoque le fin fond du Nord-pas-Calais français. Un dialecte inaudible, une population qui s’habille avec les mêmes vêtements depuis 1975 ! Un manque drastique d’hygiène et d’évolution sociétaire…. Bref, on dirait Paris XVIIIème… Pas l’arrondissement, le siècle.
Une chose récurrente dans ce pays sont les bars où nous pouvons boire une bonne bière ou enfin un vrai chocolat (avec autant de vaches, ils ne vont pas me dire que ça manque de lait…. En tout cas ça ne manque pas de laid.).
Je m’installe au bar et sans que je ne commande quoi que ce soit on me sert une « bière », une Guinness. Comment une bière peut-elle être aussi mauvaise et avoir cette couleur…. On dirait que l’Hangus a déposé quelque chose à l’intérieur lui donnant cette couleur et ce goût. Je vois bien qu’il me faut ingurgiter la chose sous peine d’être lapidé, torturé ou mangé par les autochtones… Cela restera pour moi dans les mémoires d’outre-tombe de mon Gosier (Théophile).
Une fois la pause terminée, le reste du chemin se passe comme le reste : Hangus, moutons, rien… Hangus, moutons, rien, etc. Je me languissais de l’aventure à cheval et elle arrive… à dos d’âne. 3 Kilomètres à dos d’âne… Comme l’équidé à longues oreilles sous mon fondement, je me sens « carotter ». Le viel homme qui nous emmène est aussi patibulaire que gras et mon Dieu il doit bien manger à la cantine.
Soudain, une ombre gigantesque. Un hurlement. Un âne a disparu. Je quitte mon débile destrier et me campe sur mes pieds. Je scrute les alentours, on ne voit rien. La forêt emporte avec elle, l’ombre, le cri et le pauvre canasson. Avec mon guide Patrick Bulaire on se regarde effrayés. Puis, une seconde ombre. Un second hurlement et mon destrier disparait.

L’aventure commence enfin mais je sais plus si j’en ai envie. Je voulais vivre des nuits fantastiques comme dans la cafetière de Théophile Gauthier, mais je me vois plus dans Zombieland. Mais comme dans le film, la règle n°1 c’est d’avoir un bon cardio. Visiblement Patrick le gros guide ce n’est pas son truc. Bon point pour moi. Je sprint à travers la forêt, laissant le guide vivre ce qu’il doit vivre. Je me griffe dans les ronces, je m’arrache le jeans dans des orties mais je vois enfin la petite auberge de l’annonce. J’entre en hurlant au secours, expliquant à une vitesse prodigieuse tout ce qui s’est passé et que je n’ai pas vu. La dame me regarde, m’invite d’un geste à m’asseoir et dans un bon français me demande :
« Qu’est-ce-que je peux vous servir ? »
Je demande un chocolat, elle me fait signe qu’elle n’en a pas. Je demande du mouton, elle décline à nouveau…
« Vous avez quoi ? » me risquais-je à demander.
« Du coca et un sandwich au saucisson d’âne » dit-elle fermement mais dans un bon français.
« D’accord…. Frais le coca ? » osais-je
« On n’a pas l’électricité, pas de frigo, donc non mon bon monsieur »
Elle pose le tout rapidement devant moi. Mais au loin je perçois le ciel s’assombrir, puis un hurlement et le seul âne protecteur encore présent se trouve entre du beurre et de la salade…
Je reste alors pétrifié sur ma chaise, me remémorant comment j’avais obtenu ce voyage, j’avais moi aussi était bête comme un âne.
Comme si elle lisait dans ma tête, la dame me répondit :
« Pas comme un âne, mais un Hang. Vous êtes un Hang Irlandais. Vous n’avez fait que critiquer notre beau pays…. Le Dullahan ne permet pas. »
La peur monte, puis la tétanisation, l’impossibilité de bouger, atone je ne parviens même plus à penser….
J’ai mal partout et froid et chaud cola…
Yothann Nialetsac
Références et jeux de mots souligne un très joli style littéraire. Hâte de découvrir la suivante...